Rencontre avec les profs

Tout parent avec des enfants scolarisés connait la routine des bulletins et des rencontres parents/professeur. Grand monstre poilu dans sa nouvelle école n'échappe pas à la règle. Pauvre lui. Il se la coulait douce depuis le début de l'année scolaire. Rien n'était obligé, les leçons étaient données comme étant optionnelles, me disait-il. Ha Ha!

Maman a rencontré son professeur et son orthophoniste. Fini la récré! Les leçons sont obligatoires contrairement à ce qu'il avait compris (hum!). De plus, monsieur avait une attitude plutôt passive dans les cours, selon son prof. Il se couchait sur le bureau, découpait son efface en milliers de petits morceaux au lieu d'écouter attentivement. Il était temps d'intervenir.

Une des raisons pour laquelle nous étions réticents à une classe spécialisée est la ouate dans laquelle on entoure ces enfants ayant des problèmes d'apprentissage. C'est vrai que vivre uniquement des échecs ne font pas en sorte que l'école devienne un lieu d'apprentissage pour ces enfants. Qu'ils doivent vivre des victoires pour reprendre confiance en eux. Mais l'échec a une vertu d'apprentissage. Les meilleures leçons de vie viennent de nos erreurs. Le but dans la vie ce n'est pas de ne pas avoir d'échec, c'est de savoir se relever après! C'est ça qui est le plus dur à enseigner à ses enfants. Les «ogues» et «istes» ont tendance à surprotéger ces enfants mais ils ont besoin eux aussi d'objectifs un peu dur à atteindre. Cela ne peut pas être facile tout le temps.

Une semaine d'exigences plus élevées et voilà que Grand monstre poilu a une nouvelle attitude. Voyons si cela restera pour le reste de l'année.

Une journée d'hiver

Mes fils sont des Montréalais, c'est rare qu'ils puissent avoir une journée de congé en raison de la température et c'est Papa qui en profite! Chanceux va! Ils sont à la maison en train de se chamailler, de râler que l'autre l'a poussé, de crier, de jouer à des jeux vidéos avec le son à fonds la caisse... Une vraie partie de plaisir!

Moi, j'ai grandi à la Baie James. Cela fait des souvenirs un peu inhabituels. Il arrivait assez souvent que l'école soit fermée en raison du froid ou d'une tempête même si elle était toute près de nos maisons. Je me souviens qu'on ne pouvait pas aller skier quand la température descendait en bas de -20 degré celsius en raison des engelures qui pouvait arriver sans qu'on s'en aperçoive. On faisait des parties de cache-cache entre les tuyaux des maisons, qui étaient hors terre entourés d'isolants et encaissés dans des longs corridors de bois.

Les bons coups de la CSDM

J'ai contacté Katia Gagnon, une journaliste qui a fait d'excellents reportages sur le français dans nos écoles. Je voulais lui parler de l'expérience de la CSDM qui investit dans des classes spécialisées pour les dyslexiques et qui y met beaucoup de ressources. Si plus de gens sont au courant de leur existence et demande que leur enfant y ait accès, l'expérience sera renouvelée et peut-être même (on vit d'espoir) élargie. On verra si elle pourra faire une suite. J'ai juste été un peu dure pour certains parents. J'ai dit que les parents savent dans leur for intérieur que leur enfant est en difficulté. J'ai juste oublié de prendre en considération l'hérédité. Souvent la dyslexie est héréditaire. Si les parents sont atteints, comment peuvent-ils aider leurs enfants?

En parlant, elle m'a refait vivre quelques années difficiles au moment où on cherchait à mettre le doigt sur le problème. Je vous promets de coucher cela sur papier prochainement pour que les autres sachent où chercher de l'aide.

Les dictées au secondaire

Cet article a fait jaser... On a ri jaune de voir les fautes des enfants qui démontraient les lacunes de notre système scolaire. Et si on démontrait autre chose? La conjointe d'un ami, neuropsychologue, a vu tout de suite l'anomalie des fautes «anvendure» «imprecionnant» «foteil». Moi aussi. Ce sont les fautes que mon fils dyslexique fait. Et si ces dictées nous montraient autre chose? Que la dyslexie est plus répandue qu'on pensait. Que des tonnes de jeunes arrivent à passer entre les mailles du filet, sans jamais être diagnostiqués, passant péniblement d'année en année, se demandant pourquoi le français est si difficile. Comment le savoir sans faire les tests? Si notre système montrait plutôt son incapacité à cerner les problèmes?

Chose certaine, on fait les gorges chaudes de leurs fautes, mais ces jeunes peuvent se reconnaitre aujourd'hui. Ils voient étaler pour tout le Québec leurs lacunes. Comme dit mon chum, «j'espère que leurs parents ne lisent que le Journal de Montréal».

La peur du sang

Grand monstre poilu s'est évanoui en classe hier.

Il ne se souvient plus de ce qu'il faisait. Il se rappelle s'être coupé, d'avoir vu du sang. Après, il s'est senti mal et la classe au complet a entendu BOUM. Il se rappelle seulement avoir ouvert les yeux sur son professeur qui amenait un pansement.

La coupure est minuscule. Il a eu cent fois pire au cours des années. La peur du sang est une nouveauté pour lui comme pour nous. (Quoique son père avoue se sentir mal quelques fois devant des émissions d'ER).

Je suis arrivée à l'école pour le chercher (l'école ne garde pas les enfants dans les cas d'évanouissement et de baisse de pression). Il avait un sourire penaud. «Tu sais Maman je me suis senti vraiment mal. Je n'ai pas fait cela pour manquer une journée. Je te le jure!»

Cette fois-ci, je suis certaine de ne pas me faire avoir. Mais j'aime bien qu'il soit conscient que je ne suis pas si facile à berner.

Les spécialistes

Savoir n'est pas toujours une sinécure. Connaître son enfant peut s'avérer une expérience difficile émotionellement.

Un enfant avec des problèmes attire dans son sillage une foule de spécialistes qui analysent ses comportements et ses connaissances de fond en comble. S'assoir en tant que parent devant un spécialiste pour discuter de ses résultats est une expérience en soi. On vous présente d'abord un rapport écrit dans un langage fermé pour un néophyte. On explique ensuite point par point. La liste des tests est généralement longue. Si vous êtes chanceux, tout est dans la zone normale. On accepte même que cela soit un peu bas dans cette zone tant que cela reste normal.

Les plaies s'ouvrent à chaque fois que le spécialiste parle de problèmes modérés à sévères. Une fois les mots prononcés, on a de la difficulté à garder le «focus» sur le positif.

Quand Grand monstre poilu a eu son diagnostic de dyslexie modéré et de dysorthographie sévère, nous avons pleuré silencieusement à chaque point apporté par les deux spécialistes devant nous. La neuropsychologue et l'orthophoniste prenaient des gants blancs et allaient très lentement dans leur explications. Elles étaient très conscientes de planter un pieu dans notre coeur et de l'enfoncer avec chaque phrase qu'elles prononçaient.

Cette semaine, ce fût le tour de Petit monstre poilu qui a eu son deuxième diagnostique orthophoniste en deux ans. Sommes toutes, c'est positif. Il démontre des améliorations si on compare avec le premier rapport. Il reste des lacunes qui vont de modéré à sévère selon le cas. Et il y a toujours ce nuage noir, la possibilité d'un trouble, qui plane au-dessus de notre tête. S'il s'améliore rapidement, on oublie le trouble. Sinon....

J'écoutais cela avec le cellulaire en l'air pour que l'autre moitié de notre équipe puisse écouter lui aussi les commentaires de l'orthophoniste. À la fin j'ai repris mon téléphone:

«Alors, as-tu des questions?» ai-je demandé

«Non, je m'inquiète pour toi. Comment toi tu vas avec tout cela.»

«Tu me connais trop, mais cette fois-ci cela va. Je peux encaisser.»

Il me reste maintenant à passer le test de l'orthopédagogue de l'école et de la psychologue de la commission scolaire.

Ultimement, ces femmes ne dressent qu'un portrait partiel et incomplet de nos enfants. Ils sont plus que les sommes de leur lacune.

Je me suis fait avoir

Cela arrive aux meilleurs parents/détectives. Ce matin Grand monstre poilu était fatigué. À tel point qu'il est retourné se coucher après avoir déjeuné. Un peu inquiet, nous avons fait un interrogatoire en règle: prise de température et questionnaire médical (bâti laborieusement au cours des années grâce à maintes visites à l'hôpital pour rien). Son père et moi avons décidé qu'il resterait à la maison avec lui aujourd'hui. Cela tombait bien, il avait un texte à écrire.

Je téléphone une heure plus tard pour avoir des nouvelles. Qui répond? Grand monstre poilu en grande forme qui écoute des émissions de télé affalé dans le sofa. Sa voix est claire et enjouée, pas du tout fatiguée et sans énergie.....

J'imagine que cela lui fera un bon souvenir plus tard. Une fois de temps à autres, c'est bien d'avoir le dessus sur les grands et de se faire une petite pause à soi.

Sa prochaine prestation devra être remarquable s'il veut que cela se reproduise.

Les examens d'entrée pour le secondaire

C'est la folie furieuse au bureau et l'un des sujets de conversation préférés de mes collègues: les examens d'entrée des écoles privées. Ils stressent, trouvent le processus éreintant et difficile pour les enfants. Mais ce sont eux qui poussent leurs enfants à aller au privé.

C'est vrai que visuellement, les écoles publiques peuvent difficilement combattre à armes égales. On en parle pas du même budget, ni du même empressement à impressionner les parents. Une collègue me parlait de ses visites récemment. à l'école privée, il y avait une brigade d'étudiants qui attendaient les parents. Ces deniers étaient séparés par groupe et l'élève prenait la peine de faire visiter toutes les classes, le gymnase, la cafétéria etc... Ensuite, une présentation multimédia était faite aux parents. Ces derniers étaient prêts à sortir leur chèques immédiatement, mais il reste toujours la formalité des examens!

La visite dans une école publique, bien cotée, était autre. Les parents n'étaient pas attendus par des brigades d'enfants bien élevés. On passait dans une classe avec un semblant de présentation où un élève faisait du «break dance» était projeté sur le mur. Les chaises étaient brisées. Au gymnase, l'équipe football assis derrière une table avait une attitude définitivement adolescente qui n'engageait pas du tout la conversation. Dans une classe, un prof sans dentier dans le bas donnait faisaient des expériences de chimie pour des étudiants venus visiter. Bref, pas une belle image.

Laquelle pensez-vous qu'elle voudrait pour sa fille? Comment trouve-t-on l'âme d'une école autrement qu'en fréquentant cette école? Comment ne pas se fier uniquement sur l'image projetée? Les chaises brisées sont une chose. La façon dont l'école traite ses élèves en cas de difficultés, le respect qu'on leur porte, la passion des professeurs pour leur métier, c'est encore plus important.

Moi, j'ai refusé l'école privée à l'époque. Je préférais la polyvalente avec tout ses défauts, incluant les revendeurs de drogue. Je m'en suis sortie très bien. La polyvalente Chavigny avait également une âme en arts dramatiques. J'ai fait deux ou trois comédies musicales. J'ai même chanté une chanson dans l'une d'elle. D'excellents souvenirs...

Alors moi, qu'est-ce que je veux pour mon garçon? Aucune école privée ne voudra de lui avec son handicap. Vais-je avoir le choix pour lui? Il se peut que non, il se peut que je sois obligée de prendre la classe spéciale qu'on va lui donner dans une école secondaire X.

C'est donc avec un drôle de sentiments que j'entends ces conversations. Il y a un peu de jalousie, je ne m'en cache pas. En même temps... Avec Grand monstre poilu, j'ai appris à voir la performance autrement. Mon fils en tant qu'humain, son estime de lui, sa curiosité envers la vie sont plus importantes maintenant que la réussite scolaire. J'ai appris à ne plus projeter sur lui mon ambition maternelle. Veut, veut pas, il y a une image de soi que l'on projette aux autres quand nos enfants vont dans une école privée difficile à entrer.

Ce que je veux c'est que l'école lui offre des choix et la possibilité de les atteindre. Le reste c'est lui qui le fera...

En attendant des nouvelles....

J'ai commencé à écrire ce blog pour parler de mon fils ainé. Je n'ai pas été très régulière sur ce sujet. En fait, je ne sais plus où il en est avec la nouvelle école. Je sais qu'il n'est plus anxieux, qu'il dort mieux, qu'il aime sa classe, son nouveau professeur/orthopédagogue, que le rythme semble correct. Sur ses progrès ou ses difficultés? Rien. Pas la peine de lui demander, il répond : «Cela va!» «Oui mais que fais-tu exactement?», demande maman, «Chais pas, je me souviens plus». Alors, j'attends la réunion parent/enseignant.

Le service autobus scolaire me tient occupé en attendant. Nous en sommes au quatrième autobus différent avec autant de chauffeur depuis le début de l'année scolaire. Il faut être patient, nous dit-on. J'appelle plus cela de la patience....

Percée de soleil

Non, Petit monstre poilu n'aura pas de service à l'école et il est sur une liste d'attente pour le système de santé. Pourquoi suis-je heureuse? Parce que son problème de langage est juste cela, un problème de langage. On peut donc corriger la situation avec de l'orthophonie. Que je paierai de ma poche.

Quand l'orthophoniste m'a dit cela, j'ai pleuré comme une Madeleine. Il a fallu que je réprime mes larmes en conduisant vers la maison lundi. J'ai fait l'épicerie avec des larmes aux yeux tout le long. Je devais avoir l'air tellement folle! J'écris ces lignes et j'ai encore des larmes aux yeux.

Il reste du travail à faire mais la lumière est au bout du tunnel. Où est la boite de kleenex????

Je ne comprends pas

Je ne comprends pas comment des organismes, qui sont mis sur pied pour s'occuper d'enfant, puissent arriver avec des moyens insidieux, perfides et hautement immoraux pour justifier le manque de service disponible.

C'est Kafkaïen!

Cela part d'un ministère qui décide de changer la classification des enfants qui présentent des troubles ou des difficultés d'apprentissage en 2000. Il y avait 31 catégories qui classaient les enfants selon leur difficultés et leur besoin de services. On a diminué ces catégories à 13. On voulait éliminer la paperasse, prendre une approche plus globale. Dans les faits, on voulait diminuer la demande et économiser sur le dos des enfants.

Le système est compliqué et long à expliquer. En gros, en diminuant les catégories, on élimine 76% des enfants en difficultés. Plus de service pour eux.

De façon plus perverse, ces enfants disparaissent des statistiques. Les chercheurs ne peuvent plus savoir combien d'enfants présentent des retards de langage en entrant à la maternelle, par exemple. En recherche, les statistiques sont importantes. Pour aider ces enfants et trouver des méthodes pédagogiques, il faut faire de la recherche fondamentale.

En information aussi. Si vous voulez savoir si le ministère de l'Éducation répond aux besoins de sa clientèle et respecte sa promesse d'injecter des sommes importantes dans les services spécialisés, vous avez besoin de connaitre combien d'enfants ont besoin d'aide. Sauf que vous n'aurez jamais la photo véridique des besoins, vous aurez une version Photoshop très retouchée.

J'ai mal au coeur, je crois que je vais aller vomir...

Ces explications techniques ont un but. Elles expliquent pourquoi la directrice adjointe m'a contacté aujourd'hui pour me dire que Petit monstre poilu n'aura pas de service d'orthophonie à l'école cette année malgré l'augmentation des services dans le Réseau. Il n'a pas de cote. Il n'a pas de cote parce qu'il entre dans une catégorie sans cote, celle des 76% d'élèves éliminés par une simple réorganisation de catégorie: les Enfants à risque. Il lui faudrait être dysphasique sévère pour avoir des services. Là, il aurait la cote 34.

Je n'ai pas vérifié les chiffres encore, mais un article spécialisé, publié dans une feuille d'information destinée aux spécialistes en orthopédagogie estime les économies réalisées par le gouvernement à trois quart d'un milliard de dollars. Une simple réorganisation de catégorie peut faire cela. C'est fantastique l'ingéniosité humaine. D'un trait de crayon, on efface des besoins.

Je vous rappelle cher lecteur que le système de santé ne prendra pas ces enfants en charge car il estime que c'est le rôle de l'école de le faire. L'école ne peut pas les prendre en charge car elle n'a pas le budget pour le faire. Ces enfants n'existent plus, ils ne sont plus comptabilisés, donc ils n'ont pas besoin de service, donc on n'a pas besoin d'autant d'argent, donc... vous voyez le raisonnement.

Je ne comprends pas.

Petit monstre poilu va!

Ce n'est pas pour rien que j'appelle mes fils des monstres poilus. Petit monstre poilu a démontré cette semaine à quel point il porte bien ce surnom. Tout excité d'avoir de la crème glacée pour dessert, il a oublié qu'il avait grandi de quelques centimètres au cours des derniers mois. Patatow! Une belle bosse sur la tête en se frappant sur le coin du congélateur!

En bonne mère (des fois cela m'arrive), je me lève de table et viens «becquer bobo». Je passe ma main affectueusement dans ses cheveux et je vois mes doigts plein de sang. Le rire s'est tu, je regarde discrètement mon conjoint toujours à table et je dis silencieusement pour qu'il lise sur mes lèvres : «il saigne». Grand monstre poilu qui a intercepté le message fait ni une, ni deux et crie: «Quoi! Il saigne!» et vlà mon petit monstre poilu qui se met à pleurer de plus belle!

J'éponge le tout, tout le monde se calme et petit monstre poilu s'installe confortablement loin du sofa du salon pour manger sa crème glacée. En tant que mère de deux garçons, je dois vous dire que les bosses et les égratignures ne m'impressionnent pas le moins du monde. Mais là, j'ai un petit doute. C'est ouvert d'un millimètre et cela saigne encore. D'un coup que c'est plus sérieux...

Je me mets à essayer de contacter Info Santé. Il faut passer par un système vocal interminable et attendre son tour pour avoir l'info. Finalement, l'infirmière me dit que je devrai consulter un médecin car, s'il a besoin de point de suture, il faut que cela soit fait à l'intérieur de 4 heures. Ah bon.

J'appelle petit monstre poilu qui mange toujours sa crème glacée, la tête penchée sur un côté pour pas que le sang lui coule dans la nuque. Papa essaie de lui dire que cela ne coule pas et qu'il peut avoir sa tête droite, mais le petit est têtu et on a d'autres bataille à faire. Je lui mets ses souliers pendant qu'il vide son bol. Pas question d'en laisser une miette...

On se dirige vers l'hôpital en voiture, je me perd, prend le mauvais stationnement, change de place car l'urgence est à l'autre bout, arrive au bon endroit, stationne la voiture et arrive enfin à la clinique de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.

Petit monstre poilu fait cela comme un grand. Il attend patiemment grâce à Nintendo et son gameboy advance (publicité gratuite ici pour l'immense service que la compagnie me procure à chaque fois que je dois attendre de long moment avec mes fils). Il a toujours la tête penchée et refuse de la redresser. On voit l'infirmière de triage qui confirme le besoin de point de suture. Au moins, on n'est pas venu pour rien... Elle essaie de persuader petit monstre poilu de redresser sa tête. Rien à faire.

Tout le processus se déroule à merveille. Il fait cela comme un brave. Son seul moment de faiblesse fût l'aiguille dans son cuir chevelu. Quand le médecin commence à coudre, il rigole et trouve que cela chatouille. Trois points de suture, une barre de chocolat et une tonne de compliments maternels et paternels plus tard, il est dans son lit, content de lui-même, et s'endort en trois secondes.

Je vous le dit, un vrai petit monstre poilu!

à force de se renvoyer la balle, elle finit par tomber...

Petit monstre poilu a un retard de langage jugé modéré à sévère. Il a fait, comme son frère, des otites à répétition toute sa petite enfance. Il avait toujours les oreilles pleines de liquide. On l'a pourtant opéré trois fois, plus des opérations sous anesthésie locale (bonjour la visite chez le médecin après avoir subit cela!) Résultat, il ne parle pas bien et cherche ses mots souvent. Il a attendu sur une liste de Sainte-Justine (il attend encore d'ailleurs) pour des services d'orthophonie. Pas de rendez-vous. Il termine sa garderie et rentre à la maternelle. Les besoins commencent à être urgent et Maman s'énerve. Elle téléphone partout et surtout à Sainte-Justine pour se faire dire que le billet de médecin envoyé par la poste ( obligatoire) n'est jamais parvenu. On attendait pour rien... Elle refait faire un billet de médecin, elle le renvoi encore par la poste mais appelle cette fois-ci pour être certaine de sa réception.

Pas de nouvelle pendant plusieurs mois.

Maman s'énerve encore et demande à savoir où se situe-t-il sur la liste? Elle apprend qu'il est encore bon dernier ou presque car il est maintenant à l'école. L'hôpital donne la priorité aux enfants qui ne vont pas encore à l'école. Cela prendra au moins deux ans et demi avant qu'on le voit! L'hôpital, et tous les hôpitaux qui offrent ce service d'ailleurs (j'ai appelé), considère que c'est maintenant la responsabilité de la Commission scolaire de Montréal d'aider mon enfant. Voulez-vous dire que la Commission scolaire qui n'est même pas capable de faire des réparations pour le toit de ses écoles désuètes et qui a des tuyaux pour recueillir l'eau de pluie qui tombe du plafond va maintenant trouver les ressources nécessaires pour mon fils? Je suis bien partie....

Heureusement pour petit monstre poilu, sa première école, excellente et formidable, était dans un secteur plus pauvre qui lui donnait droit à quelques services. Il a fait de l'orthophonie pendant une partie de l'année, mais pas à la mesure de ses besoins, faut pas être gourmand. Sa nouvelle école, elle, est dans un secteur un peu plus favorisé, elle n'a donc pas droit aux mêmes services même si elle a les mêmes besoins.

Je suis donc obligée, comme bien des familles, de me tourner vers le privé. J'appelle en me disant qu'au moins je n'aurai pas à attendre... Grave erreur! La plupart des orthophonistes au privé que je contacte ne prennent plus personne. J'ai réussi ce printemps à trouver un groupe d'ortho qui pourrait le prendre dans trois mois. Le premier rendez-vous est lundi matin.

Les troubles ne viennent pas seuls

Les troubles d'apprentissage sont souvent héréditaires. Comme si les parents n'en avaient pas assez dans leur assiette, les frères et soeurs d'un enfant avec un trouble d'apprentissage sont plus susceptibles d'être eux aussi atteints du même problème ou d'un autre différent.

Alors on regarde le plus jeune attentivement.... Je vais m'avouer quelque chose à moi et à vous par la même occasion. Je sais que mon petit monstre à poil a un retard de langage sérieux ( je vous parlerai un jour de l'absurdité du système dans son cas), je sais qu'il présente des difficultés d'attention, que la propreté est encore problématique, quoique très rare maintenant, ce qui est symptomatique d'un trouble (il retient son caca jusqu'à ce qu'il ne puisse plus et des fois la toilette est loin...), mais je ne le ferai pas examiner tout de suite. Je suis une lâche, je ne veux pas savoir jusqu'à ce que je ne puisse plus nier.

Il est sur une liste pour une consultation en neuropsychologie dans deux ans, après l'apprentissage de la première année. De toute façon, les spécialistes ne peuvent pas être sûrs avant cela. En attendant, il recommence sa maternelle.

L'article dans Cyberpresse il y a une semaine m'a fait bien rire d'ailleurs. La journaliste faisait mention des parents qui veulent que leur enfant performent mieux, qu'ils deviennent des «bôlés» alors ils attendent avant de faire commencer la maternelle. Et s'ils avaient une raison plus terre à terre, plus proche de ce que leur enfant ont besoin et non pas ce que le système érige en dogme. Ce n'est pas tous les enfants qui apprennent à la même vitesse, certains ont besoin de plus de temps pour être prêt pour l'école.

Petit monstre poilu va maintenant à l'école tout près de chez nous. Trois maisons en fait nous sépare. Alors au bout de la première journée, il sort dans la cour et dit à son éducatrice du service de garde: «Au revoir, je sais où je m'en vais» et il se dirige tout bonnement vers la sortie. Il lui a fallu quelques secondes pour comprendre que Petit monstre poilu voulait sortir de la cour. Il lui a fallu plusieurs minutes pour lui faire comprendre qu'il ne pouvait pas rentrer chez lui tout seul. Il savait où il restait lui et n'avait pas besoin de personne pour rentrer. Petit bout je t'adore!

De retour après un pause santé mentale

La Commission scolaire démocratique de Montréal a mis sur pied des classes pour les dyslexiques/dysorthographiques. Hier, c'était la première rencontre avec le prof et les trois professionnelles qui vont côtoyer nos enfants à tous les jours. Ils sont bien entourés, il n'y a pas à redire: une psychologue, une orthophoniste et une orthopédagogue pour deux classes d'élèves. Du jamais vu dans le système scolaire du Québec. Mon fil a même droit à un transport scolaire! Du luxe. Il reste juste à maman à couper le cordon ombilical et accepter qu'il attende l'autobus comme un grand garçon de 10 ans et qu'il revienne seul à la maison pour 10 minutes, le temps que j'arrive... Un apprentissage aussi dur pour moi que la lecture est pour lui, c'est pas peu dire...

Il faut dire qu'à ma décharge, le transporteur scolaire ne fait rien pour calmer mes nerfs à vif. Hier, je ne savais toujours pas à quelle heure il venait chercher mon fil, ni à quel coin de rue. Il a fallu que j'appelle l'école qui a finalement obtenue une réponse, non finale, car l'horaire devait changer encore au cours de la soirée. Si quelqu'un m'avait dit qu'un jour j'aurai une migraine de tension à cause d'un autobus scolaire...

Aujourd'hui, première journée officielle d'école, il y avait une hystérique (qui essayait de s'assumer et surtout ne pas contaminer son rejeton) qui attendait avec lui que l'autobus arrive. Je ne lui ai pas dit que je n'ai pas dormi de la nuit ou presque... Que j'ai failli changer d'avis et le voyager soir et matin comme avant...Après quelques minutes d'attente, j'aperçois une mère avec sa fille dans les mêmes classes que mon fils. Elle aussi attendra l'autobus au même coin. À deux, on a réussi à faire changer l'endroit où les enfants seront pris pour un coin de rue plus sécuritaire. À deux, on s'est senti un peu plus rassurée sur le sort de nos enfants. J'ai pu prendre ma voiture et faire ma journée de travail. Je vais quand même être au coin de la rue à l'heure pile pour le retour à la maison. Je me donne une semaine pour m'habituer et couper finalement le cordon.

Mon fils ainé a vu 5 types de professionnels différents et a trainé ses pénates a au moins 20 rendez-vous ou évaluations entre l'âge de 7 ans et de 10 ans. On a parlé d'autisme léger, du syndrôme d'asperger, d'un problème psychologique, d'un problème de l'audition centrale, d'hyperactivité, de déficit d'attention.

Le problème pour ces enfants, c'est qu'ils adoptent des comportements pour se protéger. Mon fils allait aux toilettes à tous les 5 minutes pour cacher le fait qu'il était perdu devant sa feuille de papier ou devant la tâche exigée. Il était mal assis sur sa chaise. Quand il ne comprenait pas le cour, au lieu de demander explications, il se mettait à rêvasser. On voyait ses comportements comme la source du problème au lieu de voir qu'ils lui servaient de paravent. On a donc souvent un diagnostique après avoir éliminé plusieurs autres avenues.


Un texte qui explique bien les difficultés:

http://www.ehess.fr/centres/lscp/persons/ramus/p&e03.pdf

Au début, le doute

C'est difficile pour une personne qui lit normalement de comprendre les difficultés de lecture. Je n'ai jamais eu de difficultés à l'école. J'ai toujours eu des A ou des B (dans le temps qu'ils voulaient dire quelque chose!) Quand mon fils a commencé à apprendre à lire, ce fût tellement laborieux! Je pensais que c'était normal. Je pensais, en fait, qu'il était paresseux. Il était tellement gâté dans la vie, que savait-il du dur labeur de l'apprentissage? Quand est venu le temps de lire des textes courts, c'était la catastrophe. Ce n'était pas normal. J'ai crié, j'ai puni, j'ai montré mon impatience maintes et maintes fois. C'est quelque chose que je porterai toute ma vie comme une blessure. Je ne sais pas si un jour, je me pardonnerai de ne pas avoir compris.

En deuxième année, les rencontres avec la direction et la professeur ont commencé. Là on m'a dit que ce n'est pas normal pour un enfant de son âge de ne pas savoir lire à ce point. Avant, je ne savais pas. C'était mon premier enfant, c'était la première fois que je voyais quelqu'un apprendre à lire. Et là nous nous sommes engouffrer dans un long tunnel à la recherche d'un diagnostique. Tout le monde a une idée sur le problème, mais bien peu savent réellement de quoi ils parlent.

J'ai vu des gens cupides, intéressés par notre argent, beaucoup plus que de trouver une solution. J'ai vu également des professionnels qui ont fait leur travail et qui n'ont pas sauté aux conclusions. J'ai surtout vu les lacunes de notre système scolaire qui n'est pas outillé pour aider ces enfants. On lit des articles sur le manque de ressources des écoles. Quand on en a besoin, on comprend le gouffre et son importance.

Entrée en matière

Il y a trois semaines, j'ai reçu un coup de massue. Mon fils aîné est dyslexique dysorthographique sévère. Jamais il ne pourra écrire de façon compréhensible sans avoir l'apport de logiciels de correction. Ce n'est pas comme si je ne savais pas qu'il avait des problèmes, je me doutais bien qu'il y avait anguille sous roche. Je n'ai pas dépensé 1400$ au privé pour le diagnostique juste pour le "fun" de voir mon argent changer de main. Alors pourquoi j'ai eu tant de peine?

Dans l'échelle de la vie, son handicap est bien léger. Il ne va pas mourir demain matin. Il n'a pas de maladie grave qui l'empêcherait de vivre pleinement sa vie. Je devrais être heureuse et remercier la vie, mais j'ai l'impression que je ne pourrai pas le faire avant un petit bout encore. Les psychologues appellent cela une blessure narcissique. J'ai mal à mon enfant idéal, disent-ils. C'est vrai, un peu. Mais j'ai surtout mal de le voir avoir tant de misère à l'école et ne pas pouvoir faire la moindre petite chose pour soulager le gros poids qu'il a sur ses épaules. Naïvement, je pensais qu'à force d'amour, de patience et de travail, je le sauverais de lui-même. Mais un cerveau branché différemment est un cerveau branché différemment. On ne peut pas ouvrir et refaire les connections, on peut juste en créer de nouvelles pour lui permettre de fonctionner.

Alors pour soulager mes cris du coeur et pouvoir dire tout haut ce que je pense tout bas sans blesser personne, je me lance dans une nouvelle carrière de bloggeuse. J'en ai long à dire...